Ligue des Champions : Andriy Lunin en pleine lumière
Arrivé dans l’indifférence générale en 2019 et plusieurs fois prêté, le portier ukrainien a su profiter des circonstances pour prouver sa valeur et s’imposer comme l’un des atouts majeurs dans la campagne européenne du Real Madrid.
"Lunin jouera." C’est par ces mots que Carlo Ancelotti a coupé court à tout suspense et renouvelé sa confiance à son gardien ukrainien. Malgré le retour de blessure de Thibaut Courtois, hors de question pour le manager italien de se passer de son totem de Krasnohrad. Une évidence tant à 25 ans, il a su se rendre indispensable dans le but du Real Madrid profitant des circonstances favorables et des blessures pour aligner les performances de premier ordre comme au tour précédent quand il dégoûta à lui seul Manchester City.
L’inspiration géniale
Pour y parvenir, il n’eut pas besoin de bouger d’un pouce. Au bout de la nuit, au cœur d’une séance de tirs au but indécise et chargée en tension, Andriy Lunin avait pris un pari. "Je devais prendre un risque. On avait choisi un tir sur lequel je ne bougerais pas et, grâce à Dieu, ça a payé", avait-il confessé après coup. Face à Bernardo Silva, le portier du Real Madrid était resté statique et le miracle avait opéré, le Portugais frappa en plein milieu, pensant surprendre son vis-à-vis.
Dans la foulée, il anticipa du bon côté (aidé par les indications de Rüdiger qui s’agitait dans le rond central ?) et détourna le tir croisé de Kovacic. Stupeur à l’Etihad Stadium et coup de grâce pour le champion d’Europe, puisqu’aucun autre joueur ne faillit, Rüdiger envoyant les Madrilènes en demi-finales. Une qualification qui doit donc énormément au gardien ukrainien. Au-delà des tirs au buts, il avait livré un festival face aux Anglais repoussant 17 de leurs tentatives.
Une performance loin d’être isolée puisqu’en huitièmes de finale, le gardien formé au Metalist Kharkiv et au FK Dnipro avait également écœuré les attaquants de Leipzig avec 9 arrêts à son actif. Pourtant, rien ne le prédestinait à jouer un tel rôle.
Opportunisme heureux
En effet, Lunin ne devait au mieux qu’être un figurant. Un homme de l’ombre cantonné à quelques bouts de match pour permettre à Courtois de souffler. Sauf que le destin s’en est mêlé pour lui offrir une opportunité. En août dernier, le portier belge se rompait les ligaments croisés du genou, suivi d'une déchirure du ménisque. Kepa Arrizabalaga arriva alors. Un intérim de quelques semaines puisqu’en novembre, l’Espagnol se blessait à son tour.
Le moment était venu pour Lunin de prouver sa valeur, cinq ans après une arrivée à Madrid dans l’anonymat le plus complet et de nombreux prêts (Leganés, Valladolid, Oviedo). Si son potentiel était connu (vainqueur de la Coupe du monde des moins de 20 ans avec l’Ukraine en 2019, ndlr), personne n’imaginait qu’il allait se montrer à ce point à la hauteur du poste. Avec lui pour dernier rempart, le Real Madrid n’a perdu qu’une fois en 29 rencontres. Et encore, une défaite concédée après prolongation en huitièmes de finale de la Coupe du Roi contre l’Atlético de Madrid (2-4 a.p.). Plus fort encore, 13 fois il est parvenu à garder son but inviolé, signe de sa solidité. "Il est bon dans le un contre. Il a de la qualité, c’est un gardien complet", a reconnu Peter Gulasci juste après la performance majuscule de l’Ukrainien face à Leipzig.
Des qualités appréciées de tous chez les Merengues au point d’avoir convaincu Carlo Ancelotti de continuer à lui faire confiance pour le match le plus important de la saison en demi-finale retour de la Ligue des Champions. Un juste retour des choses finalement pour un joueur profondément marqué par la guerre dans son pays et une nouvelle occasion de se distinguer dans un duel à distance avec la légende Manuel Neuer. "Je suis l'homme le plus heureux du monde", disait le discret Ukrainien après son récital contre Manchester City. Un homme heureux qui espère l’être encore un peu plus aux alentours de 23h ou de minuit selon que le plaisir se sera prolongé en prolongation ou aux tirs au but.